Auteur : Yannick Guéguen / Date : 29 novembre 2022
Comment inciter le public à explorer la ville hors des sentiers battus ?
Le projet "Les rues ont des oreilles" invite les étudiants et les citoyens à découvrir la ville et à la redécouvrir sous un nouvel angle. Le parcours offre trois points d’entrée, au choix du public. Il invite à voir autrement un quartier et à porter attention à des détails signifiants, tout en vivant une traversée dans les ambiances, tantôt calmes, tantôt bruyantes. L’expérience se vit de manière ludique, comme une flânerie.
Trois personnages rencontrés successivement guident l’auditeur dans le quartier … en présentant trois points de vue. Le rapport avec le contexte se présente différemment d’un personnage à l’autre. L’homme incarne le présent, il porte attention aux phénomènes d’ambiance immédiat. La femme plus jeune rend compte d’événement passé incarnant ainsi la mémoire du lieu. La femme plus âgée est dans la projection en tant que réalisatrice d’un film en train de se jouer.
Il continue à marcher au même rythme.
On reconnaît des sons familiers.
Des clés et une porte qui se ferme,
un éternuement,
un coup de téléphone
et une conversation sourde,...
tout ça va situer la scène.
En même temps, on entend ses pas
et le frottement de ses vêtements
...
Le projet a été élaboré à partir d’une analyse experte des ambiances afin de caractériser le contexte, de déceler des phénomènes d’effets sonores, ou d'identifier des situations sociales particulières. L’analyse experte a été complétée par des parcours commentés avec un groupe cible. Enfin, une recherche historique préalable a permis de compléter l’analyse des ambiances. L’ensemble a permis d’élaborer un scénario axé sur les trois relations avec les personnages.
Le parcours joue tantôt sur les effets de contraste et donc des effets de transition d’un milieu à l’autre, d’une ambiance à l’autre et des changements de niveaux sonores ou d’affluence sociale. Ces effets de contraste sont appuyés par la composition sonore. L’orientation de l’attention sur certains détails de l’environnement amène à observer des choses passant inaperçues. Le changement de perspective des personnages permet aussi d’observer l’évolution temporelle de la ville.
Le parcours audioguidé est aussi un témoin de l’évolution de la ville. Du mobilier, des sculptures ayant été déplacées, ou enlevées depuis la création du projet, il devient ainsi un marqueur des transformations urbaines. Certaines adaptations ont été nécessaires, notamment après la fermeture d’une ruelle. Il est aussi intéressant de voir ces transformations et l’audioguide devient le témoin de cette métamorphose. Une quatrième dimension est ainsi née au fil du temps.
Ce projet de type fictionnel peut s’apparenter à un cinéma sans image, le décor réel devenant ainsi la pellicule d’images. D’ailleurs, il est intéressant de considérer le son au cinéma et d’envisager comment la bande sonore accompagne l’intrigue, construit l’étrangeté du lieu. Enfin, la spécificité contextuelle du projet invite à observer la manière dont la bande sonore joue avec l’ambiance réelle, la façon dont l’une et l’autre se mixent entre elles.
Le projet aurait davantage de similarité avec le cinéma qu’il n’en aurait avec une promenade historique. Il s’agit de voir comment les configurations des lieux génèrent des intrigues, des climax, des obstacles. Autrement dit, comment participent-ils d’une ambiance sociale ? Le projet permet de faire un audit des ambiances traversées, d’en qualifier leurs qualités, leurs potentiels.
Augoyard, Jean-François et Henry Torgue (1995) À l'écoute de l'environnement : répertoire des effets sonores. Collection Habitat / Ressources, Editions Parenthèses, Marseille.
Les rues ont des oreilles - avril 2010
Réalisation et scénarisation : Yannick Guéguen, Édith Normandeau
Co-production : Audiotopie, Centre d’animation de français et Secteur d’animation culturelle du Cégep du vieux Montréal
Narration : Élise Guilbault, Annie Valin, Claude Gagnon
Conception sonore : Étienne Legast, David Martin
Masterisation : Thierry Gauthier
Graphisme : Yannick Guéguen
Processus participatif : Marilyn Petit, Johanne Tessier, Vincent Plourde-Lavoie, François Larose, Geneviève Thériault, Jérôme Guy, Paul Le Bas, Charles Lebeau-Henry, Anne-Marie Cousineau, Danielle L'Espérance, François Larose, Suzanne Carrière
Production déléguée : Anne-Marie Cousineau, Danielle l'Espérance
Soutien financier : Cégep du Vieux-Montréal